Les deux prochains événements

Fermer la recherche

La notion de travail digne pour les chrétiens

Publié le 4 mai 2022
Travail manuel

À l’occasion de la fête du 1er mai, cher aux ouvriers et travailleurs, le père Antoine Brethomé nous propose une réflexion sur le sens d’un travail digne pour les chrétiens.

Au préalable, avant de dire ce qu’est « un travail digne pour les chrétiens » il est bon d’essayer de se donner des critères du travail digne pour tout Homme qu’il fasse référence à l’Évangile ou non.Tout d’abord l’importance d’avoir un travail : « Ce qui donne de la dignité, c’est le travail. Ceux qui n’ont pas de travail sentent qu’il leur manque quelque chose, qu’il leur manque la dignité que donne le travail, comme une onction. » (pape François)

Le travail décent devrait permettre à chacun de pouvoir mener une vie digne, répondant aux besoins essentiels de la famille : nourriture, logement, éducation des enfants… Mais qu’en est-il en réalité aujourd’hui ?

Beaucoup trop de personnes en activité vivent sous le seuil de pauvreté et n’ont pas la possibilité de vivre dignement. Les causes sont multiples : des emplois précaires, des temps partiels imposés, des emplois mal rémunérés, des contrats ou des missions non renouvelés. La pandémie n’a fait qu’accentuer ces difficultés : la fin des petits boulots, l’absence de contrats intérimaires, la difficulté de trouver du travail en cette période. Pour ceux qui sont en CDI (contrat à durée indéterminée) le travail décent c’est aussi avoir de bonnes conditions de travail : ‘dans la fonction publique hospitalière, les contraintes budgétaires sont telles que les conditions de travail arrivent à des aberrations : de plus en plus d’activité dans les unités toujours en service minimum…’Voici ce que disent les salariés des EHPAD et du service d’aide à domicile : « Il y a de la frustration chez les soignants de ne pas pouvoir accomplir leur travail avec leurs valeurs, et c’est inhumain pour les résidents et leur famille. » « Non à des interventions trop courtes et minutées sans pouvoir prendre le temps de discuter avec l’aide à domicile. » « Culpabilisant pour les intervenants à domicile voire maltraitant, triste pour les bénéficiaires qui restent isolés. »

Aussi pour que ce travail soit décent, digne, les salariés demandent :* Des moyens nécessaires pour redonner du sens à ces métiers, les rendre attractifs par la reconnaissance des professions, par des conditions de travail correctes et des salaires leur permettant de vivre dignement. « Ce n’est pas en supprimant les maigres avantages que l’on va attirer du monde ».« On nous demande de gérer deux services sans même un médecin. On est rappelés sur nos jours de repos. »

Ces propos révèlent une souffrance, un mal-être et en même temps une aspiration, un désir à ce que leur dignité de femmes, d’hommes soit reconnue ; cette dignité qui est inscrite en eux depuis la création, « à l’image de Dieu il les créa » (Gn:1,27), avec cette mission de travailler la terre et d’en prendre soin (Cf Gn:2,15). De cette manière l’Homme participe de la création. « La personne qui travaille, quelle que soit sa tâche, collabore avec Dieu lui-même et devient un peu créatrice du monde qui nous entoure. » (pape François sur St Joseph n°6).

Ce monde nouveau (royaume) que Jésus de Nazareth est venu inauguré par sa vie, sa mort, sa résurrection comme une nouvelle création ; un monde nouveau déjà là mais pas encore totalement réalisé et que les femmes et les hommes au travaux habités par le Souffle du Ressuscité continuent à faire advenir quand ils se mettent debout, s’unissent à d’autres et se battent pour de meilleures conditions de vie et de travail.

C’est bien ce que veut dire l’Action Catholique Ouvrière quand elle choisit comme slogan pour sa rencontre nationale les 4-5-6 juin prochain « Co-créateurs d’un monde meilleur » : et elle développe : « Soyons acteurs dans ce monde, mettons la justice et la dignité au cœur de nos préoccupations et de nos actions ! dans la double fidélité à Jésus ressuscité et à la vie ouvrière et sociale. »

Pour en venir à un plan plus personnel, je dirais que la présence d’un prêtre au milieu des ouvriers du bâtiment, vivant les mêmes conditions de travail signifie que cette vie a du prix, qu’elle vaut la peine d’être vécue, qu’elle mérite un grand respect : ne sont-ils pas créés à l’image de Dieu ; mais quand ces visages sont blessés, déchirés, défigurés, par l’injustice, l’exploitation, l’Évangile nous presse de nous unir à d’autres et de rejoindre des organisations pour faire respecter la dignité de ces vies, pour restaurer la beauté de ces visages ; cette vie de travailleurs il faut la défendre et l’améliorer. « Nous avons, nous aussi, à faire apercevoir aux hommes la dignité infinie de leur humanité, même quand leurs conditions de vie et de travail tendent à le détruire. Il nous faut d’abord être des contemplatifs. Pour nous – et nous le croyons absolument -, un homme sauvé c’est celui qui d’abord peut vivre pleinement sa vie humaine. Jésus n’est-il pas venu pour « que les hommes aient la vie et qu’ils l’aient en abondance » (Jn:10,10) » et son attitude n’a-t-elle pas été de se mettre au service de l’Homme, de le restaurer dans sa dignité : guérir, soigner, remettre debout… » inscrivant ainsi l’Espérance au cœur de chacun.


Antoine Brethomé
Prêtre-ouvrier
Accompagnateur ACO

« * » indique les champs nécessaires

Hidden
Hidden