"Se sentir unis dans une prière commune"

Cette situation de manque est également l’occasion de vivre ces jours saints en union avec ceux dont nous parlent quotidiennement les évangiles : prier jeudi avec ceux qui soignent les autres, vendredi avec tous ceux qui souffrent, samedi avec tous ceux qui pleurent un être cher disparu et dimanche se réjouir des petites victoires vécues dans les hôpitaux manifestant que la vie est là, malgré tout !

Partager sur: Partager sur Twitter Partager sur Facebook Partager sur Google+

Le P. Jean-Laurent Martin, responsable de la Pastorale liturgique et sacramentelle du diocèse de Bordeaux, revient sur les sources d'inspiration ayant servi pour bâtir les propositions de célébrations domestiques de la Semaine sainte et des fêtes pascales.

Suite à l’arrêt des célébrations eucharistiques en paroisses, qu’avez-vous choisi de proposer aux catholiques du diocèse de Bordeaux pour vivre les rendez-vous de cette Semaine sainte ?

P. Jean-Laurent Martin : Les semaines que nous vivons depuis le début du confinement nous placent dans une situation totalement inédite, nous privant, pour beaucoup, du lien social habituel vécu par nos activités professionnelles, amicales et même familiales. Or, pour les chrétiens, l’Église est également l’une de ces familles qui aime se rassembler chaque dimanche ou pour les grands évènements de leur vie de foi. Et parmi les grands évènements de l’année liturgique, ce que nous appelons la ‘Semaine Sainte’ qui va du dimanche des Rameaux jusqu’au dimanche de Pâques, est chère au cœur des croyants. Elle ne se résume pas à la simple commémoration historique. Elle rend présent dans leur foi ces derniers jours de la vie terrestre de Jésus depuis son entrée triomphale à Jérusalem jusqu’à la découverte du tombeau vide au matin de Pâques. Seulement voilà, privés que nous sommes de toute forme de rassemblement, cette Semaine Sainte est à réinventer. C’est pourquoi notre nouvel archevêque, Mgr Jean-Paul James, et son conseil épiscopal, ont demandé à une équipe de proposer d’autres formes de célébrations adaptées au contexte actuel, à vivre en complément des multiples propositions audio ou télévisuelles que les nombreux médias proposent. Ces célébrations qui, bien que vécues dispersés, permettront à tous de se sentir unis dans une prière commune proposée à chacun, qu’ils soient seul ou en famille…



Quelles sont les sources d’inspiration ou modèles pour construire ces propositions de célébrations domestiques ? 

Ces célébrations, bien qu’inspirées des textes qui sont lus au cours des messes de chaque jour de la Semaine Sainte, ne sont pas un plagia d’une messe à célébrer chez soi. Leur structure se fonde principalement autour d’un texte biblique que les participants sont invités à lire et méditer ensemble, tout en posant des actes concrets dans le restant de leur journée auprès des personnes qui sont les plus proches. Mais les auteurs n’ont pas hésité à se rapprocher également d’autres sources. Je pense au temps de prière du Jeudi saint qui se vivra à table, et dont certains gestes s’inspireront du repas du Seder qui, pour les juifs, rappelle le repas rituel vécu avant sa sortie d’Egypte et au cours duquel Jésus, dans son dernier repas avec ses disciples, instituera l’eucharistie. De même, les célébrations de Pâques, samedi soir et dimanche, inviteront à la symbolique de la lumière ou de déplacements de pièces en pièces de la maison ou du jardin pour ceux qui ont la chance d’en avoir. Enfin, ces célébrations laisseront également la place aux plus jeunes par l’élaboration d’un ‘Jardin de Pâques’ ou l’interaction musicale entre les participants. Tout cela nous remet dans la vie des chrétiens des premiers siècles qui vivaient ces liturgies chez eux, dans leurs maisons (‘domus’, de domestique, signifiant bien ‘maison’). Ce n’est qu’à partir du IVe siècle, avec l’arrivée de l’empereur Constantin, que les chrétiens pourront eux aussi sortir de leur cloisonnement pour exercer librement leur religion et plus tard, construire des églises…



Quels fruits les communautés chrétiennes peuvent-elles espérer de cette expérience renouvelée de la célébration de la Parole et de la prière ?

Même pour des croyants, il est parfois difficile de prier en famille ! Pas facile en effet de capter l’attention des plus jeunes ou le désir de prier dans l’intimité avec son conjoint ! Le confinement nécessaire est ici une occasion de vivre cette opportunité même si, pour beaucoup, cela ne remplacera pas la joie de se retrouver au sein de leurs paroisses ou mouvements une fois ce confinement terminé. Enfin, cette situation de manque est également l’occasion de vivre ces jours saints en union avec ceux dont nous parlent quotidiennement les évangiles : prier jeudi avec ceux qui soignent les autres, vendredi avec tous ceux qui souffrent, samedi avec tous ceux qui pleurent un être cher disparu et dimanche se réjouir des petites victoires vécues dans les hôpitaux manifestant que la vie est là, malgré tout ! Toutes ces propositions créées dans l’urgence, comme pour d’autres avec le télétravail, permettront d’enrichir notre façon de prier tout en manifestant une vraie complémentarité entre ce que nous proposons dans nos assemblées à l’église et ce que l’on peut vivre chez soi !

Partager sur: Partager sur Twitter Partager sur Facebook Partager sur Google+