"Sainte Geneviève est un bel exemple de vie engagée, donnée, solidaire, marquée par le devoir."

Geneviève puise cette force de sa foi. Elle a confiance en Dieu. Elle sait que Dieu est fidèle et que, même s’il écrit droit avec des lignes courbes, « tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8, 28), comme dit Saint Paul. (Mgr Ricard)

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Homélie de Mgr Jean-Pierre Ricard, archevêque de Bordeaux, lors de la célébration de la sainte Geneviève, patronne de la Gendarmerie, le 18 janvier 2019 en l'église Saint-Augustin à Bordeaux.

 

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Mesdames, Messieurs,

 

C’est le Saint pape Jean XXIII qui, le 18 mai 1962, a donné Sainte Geneviève comme patronne à la gendarmerie. On peut s’interroger sur les raisons qui ont présidé à un tel choix. En quoi la référence à cette femme, qui a vécu au cinquième siècle et qui a choisi la consécration religieuse, peut-elle être parlante pour des gendarmes et plus largement pour nous aujourd’hui ?

 

La vie de Sainte Geneviève est riche de leçons. Elle vit dans une période troublée, marquée par de multiples formes de violence. C’est l’invasion d’Attila et des Huns qui terrorisent la région et mettent le siège devant Paris. Childéric, le roi franc voudra également s’emparer de Paris et affame la ville. Geneviève sera confrontée aux luttes entre les wisigoths, marqués par l’hérésie arienne, et les francs. Sa vie n’a pas été de tout repos.

 

Or, ce qui me frappe, c’est son engagement pour sa ville, pour son peuple. Elle aurait pu retirer son épingle du jeu, ne penser qu’à elle, s’enfermer dans l’enclos protecteur de sa vie religieuse. Elle aurait pu fuir comme ces riches qui ne pensaient qu’à leur protection personnelle et qui voulaient se mettre à l’abri dans d’autres villes. Elle leur dira : « Que parlez-vous de vous réfugier en d’autres cités ? Celles-ci seront-elles mieux que Paris abritées contre un coup de main des barbares ? Paris, grâce à la protection du Christ, échappera au carnage ».

 

Geneviève est un bel exemple de vie engagée, donnée, solidaire, marquée par le devoir. Elle a le sens du bien commun, de la collectivité. Nous dirions aujourd’hui de l’État ou de la nation. La défense des seuls intérêts personnels ou catégoriels ne contribuera jamais à former une société où il fait bon vivre. Les combats de Geneviève s’inscrivent dans une tout autre logique de vie.

 

Qu’y a-t-il dans l’engagement de Saint Geneviève ? Tout d’abord un combat contre tout ce qui amène le mal, le malheur, la cruauté, la violence sous toutes ses formes. Elle veut défendre les populations et promouvoir la paix. Elle met en œuvre cette parole de Jésus dans les Béatitudes : « Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9).

 

Geneviève est réaliste. Elle est une femme d’action. Elle sait qu’il ne peut y avoir de paix sans justice, sans que chacun ait de quoi se nourrir, vivre et survivre. Au moment du siège de Childéric, avec onze bateaux, elle va forcer le blocus sur la Seine et ramènera du ravitaillement pour nourrir les parisiens affamés.

 

Quand elle voit que des hommes sont prêts à flancher et à fuir dans une sauve-qui-peut général, Geneviève fait appel aux femmes et les galvanise pour le combat : « Que les hommes fuient, s’ils veulent, dit-elle, s’ils ne sont plus capables de se battre. Nous les femmes, nous prierons Dieu tant et tant qu’il entendra nos supplications ». Et elle fait référence à ces femmes fortes de l’Ancien Testament que sont Judith et Esther.

 

Quand on s’engage, vous le savez, il arrive souvent que l’on prenne des coups. Sainte Geneviève ne fut pas épargnée. Ses prises de position contrarièrent un certain nombre de ses contemporains qui n’étaient pas pour la défense de la ville à outrance. On l’accusa même d’être « prophétesse de malheur ». On voulut la lapider puis la jeter à la Seine. Elle ne dut son salut qu’à l’intervention de l’archidiacre d’Auxerre qui venait porter des pains bénis après la mort de son évêque, Saint Germain. Il prit alors la défense de la sainte, arrêta les violents et rappela combien son évêque qui venait de mourir avait de l’estime pour Geneviève. Il déclara : « Parisiens, n’allez pas commettre ce forfait : celle dont vous projetez la mort est, au témoignage du saint évêque Germain, l’élue de Dieu dès sa venue au monde. Et voici les eulogies (les pains bénis) que je lui apporte de la part de l’évêque défunt ».

 

On peut se demander où Sainte Geneviève puise la force intérieure qui est la sienne, un courage qui lui permet de faire face à toutes les difficultés ou épreuves qu’elle rencontre. La réponse est claire. Geneviève puise cette force de sa foi. Elle a confiance en Dieu. Elle sait que Dieu est fidèle et que, même s’il écrit droit avec des lignes courbes, « tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu » (Rm 8, 28), comme dit Saint Paul.

 

Geneviève sait que le Christ est son compagnon de route, celui sur lequel on peut compter. Elle a confiance en sa parole, en sa présence, en son action. Elle s’appuie sur le Seigneur, fait sa volonté. Elle a fait siennes les paroles de Jésus : «  Ainsi, celui qui entend les paroles que je dis là et les met en pratique est comparable à un homme prévoyant qui a construit sa maison sur le roc. La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, les vents ont soufflé et se sont abattus sur cette maison ; la maison ne s’est pas écroulée, car elle était fondée sur le roc.».

 

Geneviève a reçu du Christ un esprit de force, de courage, de paix, de solidarité et de confiance. Qu’elle nous aide à le demander au Seigneur dans cette eucharistie ! Amen. 

+ Jean-Pierre cardinal RICARD

Archevêque de Bordeaux

 

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