“ Le Seigneur nous donne de ressentir sa présence ”

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Homélie de Mgr Jean-Pierre Ricard, prononcée lors de la vigile pascale, le samedi 19 avril 2014, en la cathédrale Saint-André à Bordeaux.

Qu’avons-nous fait durant cette longue vigile pascale et cette liturgie de la Parole, sinon faire mémoire du Seigneur. Faire mémoire pour des croyants, ce n’est pas seulement proclamer des textes anciens, évoquer l’histoire de nos Pères dans la foi ou redire quelles sont nos racines spirituelles, c’est nous remettre devant l’action du Seigneur qui, aujourd’hui, vient à la rencontre de son peuple. Quand les juifs, par exemple, célèbrent le repas pascal, ils font bien mémoire de la sortie d’Egypte, mais c’est pour se remettre devant ce Dieu qui les a libérés, qui vient les libérer aujourd’hui et qui les libèrera  demain.  C’est là leur foi et le fondement de leur confiance.

L’Église fait de même quand elle célèbre Pâques.

“Célébrer Pâques, c’est donc témoigner d’une expérience, celle que nous fait vivre ce contact avec le Christ ressuscité”

Célébrer Pâques, c’est tout d’abord faire retentir aujourd’hui ce témoignage apostolique qui se transmet de génération en génération : ce Jésus qui a été crucifié, qui est mort et a été mis au tombeau, Dieu l’a relevé d’entre les morts, l’a ressuscité. Il l’a fait Seigneur et Christ. C’est lui qui apporte le salut aux hommes, cette promesse de vie, de vie pleine, de vie éternelle. Comme le dit Saint Pierre au lendemain de la Pentecôte : « Il n’y a aucun salut ailleurs qu’en lui ; car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés » (Ac 4, 12). Cette proclamation apostolique est le cœur même de notre foi. Sans la résurrection du Christ, tout s’effondre. Saint Paul le dira avec force aux Corinthiens : « Si le Christ n’est pas ressuscité des morts, notre foi est vide…et nous sommes les plus malheureux des hommes » (1 Cor 15, 17, 19).

Ce témoignage est crédible, car les apôtres nous relatent ce qui leur est arrivé, presque à leur corps défendant. Au moment de la mort de Jésus, nous ne sommes pas devant des phénomènes de ferveur et d’exaltation collective, où des disciples auraient tellement voulu revoir le Maître qu’ils se seraient persuadés qu’ils l’avaient aperçu ! Au contraire, ils vivent une épreuve pour leur foi. Ils vont reprendre leur vie antérieure, leur profession. Comme dit Saint Jean : « Ils n’avaient pas encore compris l’Ecriture selon laquelle Jésus devait se relever d’entre les morts » (Jn 20, 9). Il faudra que le Christ se manifeste à eux, se fasse reconnaître, pour qu’ils se rendent à l’évidence, pour que disparaissent leurs doutes et renaisse leur foi.

C’est cette confession de foi qui nous habite aujourd’hui. Mais, elle ne nous habite pas comme une croyance, comme une simple idée, une conviction qui resterait en quelque sorte extérieure à nous. Celui que nous proclamons ressuscité est un vivant, un vivant qui veut entrer en relation aujourd’hui avec nous. Il veut nous communiquer une vie nouvelle. Célébrer Pâques, c’est donc témoigner d’une expérience, celle que nous fait vivre ce contact avec le Christ ressuscité. Ceux qui en témoignent fortement, ce sont les convertis, et, en particulier, beaucoup de ces catéchumènes qui vont être baptisés en cette nuit pascale. Quand on les écoute nous raconter leur découverte du Christ, ils nous disent que leur vie a changé, que leurs yeux se sont ouverts, qu’ils ne voient plus les choses comme avant.

“Jésus fait à ses disciples cette promesse : quand ils seront en mission, ils le rencontreront”

Mais, me direz-vous : ils n’ont pourtant pas vu le Christ. En effet, la relation immédiate  qu’ont eue les apôtres avec le Seigneur Ressuscité a cessé avec l’ascension. Nous sommes aujourd’hui dans la situation dont parle Jésus quand il dit : « Heureux ceux qui croiront sans avoir vu » (Jn 20, 29). Nous croyons dans le Christ sans le voir. Pourtant il n’est pas ce grand absent dont nous n’attendrions le retour qu’à la fin des temps. Il a dit à ses disciples qu’il ne les laisserait pas orphelins. Il veut mystérieusement être présent à nous comme un compagnon de route. Ne dit-il pas dans l’Evangile selon Saint Matthieu  - et ce sont ses dernières paroles - : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des siècles » (Mt 28, 20) ? Il y a, en effet, des lieux et des moments où le Seigneur nous donne de ressentir sa présence. Il touche alors nos esprits et nos cœurs, nous éclaire et nous fait goûter la puissance de sa grâce. Il vient, en effet, à nous de multiples manières : 

- dans la lecture de l’Ecriture : nous sentons à certains moments brûler nos cœurs comme l’expérimentent les disciples d’Emmaüs avec le voyageur mystérieux, qui les a rejoints;

- dans la célébration de l’Eucharistie, où, à travers le pain partagé, c’est son propre corps qu’il nous donne ;

- dans la prière où nous nous disposons à une visitation intérieure du Saint Esprit ;

- dans l’action missionnaire et le témoignage donné au Seigneur. Vous avez entendu ce que Jésus a dit aux femmes : «  Allez annoncer à mes frères qu’ils doivent se rendre en Galilée : c’est là qu’ils me verront » (Mt 28, 10). Cette Galilée, surnommée aussi Galilée des nations à cause de sa population mêlée ne désigne pas qu’un territoire géographique. Elle  évoque aussi symboliquement les terres païennes, où l’Evangile devra être annoncé. Jésus fait à ses disciples cette promesse : quand ils seront en mission, ils le rencontreront. C’est l’expérience que font aujourd’hui, dans notre diocèse,  tous ceux qui sont entrés dans l’aventure de semaines paroissiales d’évangélisation. Les évangélisateurs dans la mission sont les premiers évangélisés. Ils racontent combien leur foi a été réveillée et leur vie chrétienne dynamisée. Si le pape François invite l’Eglise à « sortir » pour témoigner de sa foi, c’est parce qu’il sait qu’en agissant ainsi, elle va à la rencontre de son Seigneur qui l’a précédée, qui l’attend et qui va la renouveler intérieurement.

- Enfin, le Ressuscité se donne aussi à rencontrer dans le frère qui a besoin de nous. Je vous renvoie à la parabole du jugement dernier : « Ce que vous avez fait au plus petit d’entre mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40). Quand nous prenons du temps pour écouter quelqu’un, le visiter et l’aider, nous sentons dans notre cœur cette paix intérieure, cette joie et cette satisfaction qui sont autant de signes de cette présence en nous de l’Esprit du Ressuscité.

Frères et sœurs, accueillons ce soir le Christ Ressuscité. Laissons-nous renouveler par lui. Nous allons proclamer ensemble notre profession de foi baptismale. Qu’elle exprime notre volonté de vivre avec le Christ une vie vraiment renouvelée. Amen

† J​ean-Pierre cardinal Ricard

Archevêque de Bordeaux

 

 


 

source image : Les saintes femmes au tombeau - Maurice Denis.

 

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