“ Le fil conducteur de l’évangélisation, c’est l’amour ”

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Homélie prononcée par Mgr Jean-Pierre Ricard lors de la messe de rentrée de l'Enseignement catholique, le mercredi 17 septembre 2014 en l'église de la Trinité du Grand Parc à Bordeaux.

Chers amis,

S’il y a un souci qui marque aujourd’hui la vie de notre Eglise, c’est bien celui de l’évangélisation. En novembre dernier, notre pape François signait sa première exhortation, qui est un peu comme son discours programme, la Joie de l’Evangile. En juin, notre diocèse promulguait au cours de notre grande fête diocésaine une Charte de l’Evangélisation. Loin de s’enfermer dans son organisation et ses propres réseaux, l’Eglise doit aller à la rencontre des enfants et des jeunes, des hommes et des femmes de notre temps. Plus d’une fois, le pape François l’a rappelé : l’Eglise doit « sortir » pour aller vers les périphéries, vers ceux dont elle est loin, vers ceux qui attendent, sans toujours le savoir, une parole d’amour, une parole d’espérance, une parole de foi. Longtemps, on a considéré nos établissements catholiques comme des organismes internes à l’Eglise, strictement confessionnels, fréquentés par des enfants ou des jeunes de bonnes familles catholiques. Aujourd’hui, la plupart de nos établissements font partie de ces périphéries dont parle le pape François. Ils sont fréquentés par des familles qui souvent n’ont pas d’autres liens avec l’Eglise ou avec la proposition chrétienne. Des enfants et des jeunes arrivent sans contact préalable avec la foi. Certains ne sont pas baptisés. Je suis convaincu qu’il y a là, aujourd’hui, pour l’Eglise en France à travers l’Enseignement catholique une surface de contact avec des familles et des jeunes qui peut être précieuse pour l’évangélisation.

Qu’appelle cette évangélisation ?

“L’œuvre éducative est une des composantes de l’évangélisation”

Tout d’abord, l’accueil inconditionnel de chaque enfant et de tous les enfants. L’exigence de cet accueil ne se trouve pas uniquement dans ce que nous demande la Loi Debré, mais dans l’Evangile lui-même. Jésus, nous le voyons, accueille sans distinction ou discrimination tous ceux qui se présentent à lui. A ses yeux, toute personne est unique. Il est le fils, la fille, bien aimés du Père. Il est aimé et accueilli avec amour. Jésus appelle chacun à développer  les potentialités de foi et d’espérance dont il est porteur. On peut dire que cet amour révèle les êtres à eux-mêmes.  C’est dans la mesure où nos établissements vivront un tel accueil qu’ils entreront vraiment dans cette dynamique de l’évangélisation.

Souvent, quand on parle d’évangélisation, on pense à une annonce explicite de la foi, à la catéchèse, à une proposition pastorale. Cela fait, bien sûr, partie de l’évangélisation. J’y reviendrai un peu plus loin. Mais l’œuvre d’évangélisation est plus large. Elle est l’offre d’un salut qui concerne tout l’homme, dans toutes les dimensions de son être. Elle est pratique d’humanisation. C’est pour cela que l’œuvre éducative est une des composantes de l’évangélisation. Elle s’adresse à l’enfant ou au jeune. Dans le cadre scolaire, elle vise à former son intelligence, par l’acquisition de savoirs et de savoirs-faire. Mais elle prend en compte aussi le développement de son corps, de son affectivité, de sa vie relationnelle, de son intériorité. Saint Jean Bosco, dont on va fêter l’année prochaine le  deuxième centenaire de sa naissance, a été un magnifique évangélisateur et un remarquable éducateur, et évangélisateur parce qu’éducateur ! Je signale d’ailleurs à ce propos qu’un certain nombre d’acteurs dans l’Enseignement catholique peuvent participer à cette dynamique de l’évangélisation, même s’ils ne partagent pas pleinement toutes les dimensions de la foi chrétienne. S’ils sont des passionnés de l’éducation, s’ils aiment les enfants et les jeunes, ils entrent dans cette grande aventure de l’évangélisation.

Mais l’évangélisation implique aussi une proposition de la foi. Il ne s’agit pas là de prosélytisme intempestif ou d’endoctrinement de la part de gens convaincus qui veulent diffuser leur vision de la vie ou du monde. Il s’agit de la proposition d’une expérience de vie, de la communication d’une joie, celle que met dans le cœur le Christ vivant. Je crois que trop souvent, marqués par l’indifférence ambiante ou par une conception très individualiste des convictions religieuses, nous sommes terriblement frileux en ce domaine. Pourtant quelle joie pour un enfant ou un jeune de se savoir aimé et appelé à aimer ! Quelle aide de savoir que la vie a un sens, qu’on ne prend pas seul le chemin de l’existence mais que quelqu’un marche avec vous comme un compagnon de route. Des jeunes vivent des choses difficiles aujourd’hui, sur le plan personnel, familial, scolaire. Certains cherchent une voie de guérison, souhaitent oublier leur souffrance. Toutes sortes de formes d’addiction peuvent être une tentation. Nous le savons bien. Nos établissements sont concernés comme les autres. Qui annoncera à ces jeunes qu’une guérison, un bien-être, un bonheur sont possibles pour eux et que le Christ par son esprit est capable de toucher leur cœur et de les renouveler intérieurement ? C’est cela la Bonne nouvelle de l’Evangile vécue concrètement. Je souhaite que nos établissements catholiques soient un lieu où cette source d’eau vive, cette source d’amour et d’espérance, soit accueillie, présentée et proposée.

Finalement, le fil conducteur de l’évangélisation, son fil rouge, c’est l’amour, l’amour dont nous parle Saint Paul dans son épître aux Corinthiens. Cet amour n’est pas égoïste. Il n’est pas centré sur soi. Il n’est pas de l’ordre du donnant donnant. Il est centré sur l’autre. Il est généreux et gratuit : « il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. ». Vous remarquerez que cet amour n’est pas défini de manière abstraite mais qu’il est décrit par une série de verbes : il n’est pas de l’ordre du pur sentiment mais de l’action. Il ne se paie pas de mots. Il agit.

Cet amour a sa source en Dieu lui-même. En nous, il est un fruit de l’Esprit. Il nous faut le demander au Seigneur et le recevoir de Lui.  S’il y a un lieu d’ailleurs où cet amour nous est communiqué, c’est l’Eucharistie. C’est elle qui nous greffe sur le Christ comme le sarment sur la vigne. Demandons, ce soir, au Seigneur dans cette participation à l’Eucharistie d’être habités par ce feu intérieur de l’amour.

Finalement, l’évangélisation n’est pas autre chose que le rayonnement de cet amour.

 

† Jean-Pierre cardinal Ricard

Archevêque de Bordeaux

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