Affermis dans la Foi

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Catéchèse de Mgr Ricard aux JMJ, mercredi 17 août 2011 - La question qui est au cœur de notre catéchèse, ce matin, est celle-ci : qu’est-ce que c’est que poursuivre sa route dans le Christ, affermis dans la foi ? Comment cela est-il possible, en particulier dans l’environnement quotidien qui est le nôtre aujourd’hui ?

Chers amis, 

Vous savez que ce sont ces versets de l’épître de saint Paul aux Colossiens qui ont été choisis par le pape Benoît XVI comme thème de nos JMJ :

« Poursuivez votre route dans le Christ Jésus le Seigneur, tel que vous l’avez reçu ; soyez enracinés et fondés en lui, affermis ainsi dans la foi telle qu’on vous l’a enseignée, et débordants de reconnaissance » (Col. 2, 6-7).

La question qui est au cœur de notre catéchèse, ce matin, est celle-ci : qu’est-ce que c’est que poursuivre sa route dans le Christ, affermis dans la foi ? Comment cela est-il possible, en particulier dans l’environnement quotidien qui est le nôtre aujourd’hui ?

I – ETRE CROYANTS DANS NOS SOCIETES OCCIDENTALES AUJOURD’HUI

Ne croyons pas qu’il y ait eu une époque idéale où la foi aurait été facile. Le contexte dans lequel saint Paul a annoncé l’Evangile n’était pas des plus évidents. L’apôtre a rencontré accueil et refus. Chaque époque offre aux croyants des chances et des défis. Je voudrais évoquer rapidement la situation qui est la nôtre dans beaucoup de pays de l’Europe de l’Ouest.

Nous sommes dans des sociétés marquées par la sécularisation, le pluralisme et l’individualisme.

Nos sociétés sont transformées par un puissant courant de sécularisation, c’est-à-dire par une lente évolution qui amène à distendre les liens des personnes avec la foi religieuse et avec les groupes religieux d’appartenance, les Eglises en l’occurrence.

Pour dire les choses autrement : la foi chrétienne ne va plus de soi et la référence à Dieu a perdu son évidence sociale. Comme le dit Benoît XVI : «  La culture actuelle, dans certaines régions du monde, surtout en Occident, tend à exclure Dieu et à considérer la foi comme un fait privé, sans aucune pertinence pour la vie sociale. Alors que toutes les valeurs qui fondent la société proviennent de l’Evangile - comme le sens de la dignité de la personne, de la solidarité, du travail et de la famille - , on constate une sorte d’ « éclipse de Dieu », une certaine amnésie, voire un réel refus du christianisme et un reniement du trésor de la foi reçue, au risque de perdre sa propre identité profonde » (Message pour la 26e Journée Mondiale de la Jeunesse, n°1).

On peut s’en rendre compte quand on va dans d’autres régions du monde, par exemple en Afrique ou en Amérique latine et que l’on compare les situations. On  saisit alors à quel point, nous sommes, en France par exemple, sécularisés. J’ai été frappé de cela au cours d’un voyage fait au Brésil, au mois de mai. Dans ce pays, la référence à Dieu revient souvent dans la conversation, dans des inscriptions sur les voitures, dans la vie quotidienne. Les gens sont spontanément religieux (ce qui ne veut pas dire qu’ils soient tous chrétiens convaincus ou catholiques !).

L’appartenance à une Eglise ou à une « secte » fait partie de la vie sociale. En France, il y a au contraire  tout un courant qui souhaite non seulement une laïcisation de l’Etat, ce qui peut être une bonne chose, mais une laïcisation de la société où la foi serait renvoyée dans le domaine du privé, de l’intime, des convictions de chacun, ce qui est une tout autre chose. Dans cette  façon de voir, chacun, bien sûr, a droit à son jardin privé, mais à condition qu’il n’apparaisse pas. Un des signes de cette tendance est, par exemple, l’interdiction de signes religieux ostentatoires à l’école !

Une des conséquences de cette évolution est la crise de la transmission du patrimoine religieux. Au 19e siècle et dans la première moitié du 20e siècle, certains pouvaient prendre des distances vis-à-vis de la pratique ou même de la foi religieuse mais ils se mariaient à l’église, faisaient baptiser leurs enfants, les envoyaient au catéchisme. Un peu de morale ne pouvait pas leur faire du mal !

Aujourd’hui, à partir d’une même éducation, le choix des enfants sera différent : certains se marieront religieusement, d’autres pas. Il en ira de même pour le baptême ou la catéchèse des enfants. L’appui familial et social de la foi s’est terriblement fragilisé (ce qui est différent d’autres situations où communauté familiale et appartenance ethnique sont très liées : par ex . des familles maronites…). Si autrefois, il y avait une pression sociale (surtout dans les villages) qui soutenait la pratique religieuse, aujourd’hui, la pression sociale joue en sens inverse. Il faut du caractère pour résister à l’indifférence ambiante.

Une autre caractéristique qui marque nos sociétés, c’est que nous sommes dans des sociétés pluralistes. Pluralistes sur le plan religieux : aujourd’hui, toutes les grandes religions ont quitté l’ère géographique où elles sont nées et où elles se sont développées. Elles sont devenues mondiales : c’est vrai du christianisme, du judaïsme, de l’islam, du bouddhisme ou des cultes d’origine africaine et latino-américaine comme le vaudou…

Il nous arrive d’ailleurs d’être questionnés dans notre vie quotidienne par les convictions ou les pratiques des croyants des autres religions. Mais nos sociétés sont aussi pluralistes dans la cohabitation de différentes conceptions du monde, de philosophies, de façons de voir la vie. Cela peut entraîner le relativisme, cette idée que toute vérité est partielle, que chacun a sa vérité et que la vérité en soi est inatteignable.

Chacun se fait alors son éthique en fonction de ses idées, de ses convictions, de ses désirs. Il n’y a pas de normes qui s’imposent si ce n’est celle de ne pas vouloir faire du mal à l’autre (d’ailleurs sur ce point la sincérité du sujet prime souvent sur l’objectivité de l’acte).

Notons d’ailleurs que beaucoup sont tentés par un matérialisme pratique, par l’horizon de la consommation. D’où une indifférence pour les questions spirituelles ou pour la quête religieuse. Je pense à la réflexion de ces jeunes à qui on posait la question : « Ne pensez-vous jamais à Dieu ? » et qui répondaient : « On y pensera quand on sera vieux » !

Nos sociétés sont marquées également par l’individualisme, où c’est le besoin, le désir, le droit de l’individu qui prime là-aussi. Le risque est que chacun se fasse sa propre philosophie de la vie, sa propre religion : on se fabrique une religion à la carte.

On remplit son caddy des différents produits religieux ! N’oublions pas que nous sommes d’ailleurs dans une société de consommation, où le ressort économique est d’exciter le besoin individuel pour vous faire consommer, vous faire acheter le dernier produit qui vient de sortir et dont on vous promet qu’il comblera toutes vos attentes.

En fait, si nous analysons bien la situation qui est la nôtre, nous nous rendons compte que sous des apparences très libérales, notre société marchande impose ses modes de pensée : il faut aller dans le sens de l’évolution des mœurs, de l’acceptation de divers modèles de nuptialité, du mariage pour tous (hétérosexuels, homosexuels, transsexuels..).

Si vous ne l’acceptez pas, vous être un conservateur, un attardé, un « ringard », un adversaire crispé du progrès et du sens de l’histoire. Il y a des lobbys très forts qui s’expriment dans les médias et qui font pression sur nos hommes politiques. Il y a une intolérance du relativisme, du « politiquement correct ». D’où la question de certains : faut-il résister ? Peut-on résister ? Faut-il créer une contre-culture ?  Il est à signaler d’ailleurs que la dictature du relativisme est plus cachée, plus subtile, plus insidieuse qu’une dictature d’un régime autoritaire…Elle est dans l’air que l’on respire.

Voilà l’univers familier dans lequel nous vivons et c’est dans cet univers que nous avons à développer notre foi pour que nous devenions « fermes dans la foi ». Notre situation entraîne pour nous une triple exigence :

1)      que la foi soit un engagement personnel. Elle ne saurait être la seule résultante d’une tradition familiale ou d’une appartenance sociale. Marcel Légaut (un philosophe et un spirituel retiré dans la Drôme et mort il y a quelques années) disait : « Autrefois, on tenait debout parce qu’on était serré les uns contre les autres. Aujourd’hui, on tient debout parce qu’on a une colonne vertébrale ».

2)      que la foi ait un contenu. Elle ne saurait être un simple sentiment ou une émotion un peu vague. Elle ne saurait non plus se réduire à une pure croyance. Dans une société pluraliste, il faut savoir dire en quoi on croit et pourquoi on croit. On doit rendre compte de sa foi. Comme dit saint Pierre : « Soyez toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui est en vous à quiconque vous le demande » (1 Pi 3, 15).

3)     que la foi personnelle soit soutenue par un groupe porteur. Dans une société qui ne porte pas la foi des croyants, loin de là, chaque croyant a besoin de porter avec d’autres ses convictions personnelles, de les nourrir, de les approfondir, de les partager avec d’autres, au sein d’un groupe ou d’une communauté. Si la foi est bien personnelle, elle n’est pas qu’individuelle. On dit souvent qu’un chrétien isolé est un chrétien en danger. Or, je crois que la référence à l’Evangile et la foi chrétienne répondent merveilleusement aujourd’hui à cette triple exigence.

II – LA FOI DES DISCIPLES DU CHRIST

Je partirais volontiers de cette affirmation du pape Benoît XVI dans son message pour la 26e Journée mondiale de la Jeunesse : « « La foi est d’abord une adhésion personnelle de l’homme à Dieu ; elle est en même temps, et inséparablement, l’assentiment libre à toute la vérité que Dieu a révélée » (Catéchisme de l’Eglise catholique, 150). Ainsi vous pourrez acquérir une foi mûre, solide, qui ne sera pas fondée uniquement sur un sentiment religieux ou sur un vague souvenir du catéchisme de votre enfance. Vous pourrez connaître Dieu et véritablement vivre de lui, comme l’apôtre Thomas quand il manifeste sa foi en Jésus en s’exclamant avec force : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (n°4).


 

  1. La foi comme adhésion personnelle de l’homme à Dieu

Quand on ouvre l’Evangile et qu’on écoute Jésus parler de la foi, on se rend compte que celle-ci n’est pas une simple croyance qui resterait à distance du sujet mais une relation engagée.

A la Cananéenne qui lui a demandé la guérison de sa fille et qui lui a répondu avec répartie, Jésus dira : « Femme, ta foi est grande ! Qu’il t’arrive comme tu le veux. » (Mt 15, 28).

En présence du centurion de Capharnaüm qui le prie pour son serviteur, qui lui dit de ne pas se déranger mais de prononcer un seul mot  et son serviteur sera guéri, Jésus affirme : « En vérité, je vous le déclare, chez personne en Israël je n’ai trouvé une telle foi » (Mt 8, 10). La foi est donc un acte de confiance dans le Christ, une façon de s’en remettre à lui, de percevoir en lui la présence d’un Dieu qui sauve.

Cette confiance s’inscrit dans le temps. C’est à cette expérience que Jésus invite ses disciples. Il s’agit pour eux de « suivre » le Seigneur, d’être avec lui, de se mettre à son écoute, d’entrer dans son intimité, de vivre une véritable relation d’amitié. La foi a toute la densité d’une expérience, d’une relation qui dure avec le Christ, de toute une histoire avec le Seigneur. La foi ne saurait être quelque chose de périphérique, d’accessoire. Elle est un choix de vie fondamental.

Regardez l’apôtre Paul. Toute sa vie a été transformée par l’expérience qu’il a faite sur le chemin de Damas. Il n’a pas connu Jésus pendant sa vie terrestre, lorsqu’il marchait avec ses disciples sur les routes de Galilée et de Judée. Mais il a rencontré le Christ ressuscité et est devenu tout à la fois son disciple et son témoin.

On ne comprend rien à l’apôtre Paul sans cette relation fondatrice au Christ. Paul a fait l’expérience que le Ressuscité était présent, que son Amour le rejoignait et habitait son cœur.   (« Rien ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu manifesté en Jésus Christ notre Seigneur » Rm 8, 39).

Paul a une conscience très vive que toute sa vie, par l’action du Saint Esprit, est une participation à la vie du Christ, aux souffrances du Christ, à sa force, à sa joie : « Avec le Christ, je suis crucifié ; je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. Car ma vie présente dans la chair, je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi » (Gal. 2, 20). La foi de Paul est une véritable histoire de confiance, d’amitié et de communion profonde avec le Seigneur, avec le Christ.

Tant que nous ne sommes pas entrés dans cette relation personnelle au Christ, nous ne sommes pas encore devenus chrétiens. Cette histoire avec le Christ peut avoir des hauts et des bas. Il peut y avoir des moments où comme Pierre nous avons pu avoir des doutes, des distances avec le Seigneur, des moments de combat spirituel, mais revenons toujours à cette amitié avec le Christ.

Dites-vous que le Seigneur est toujours là, qu’il vous attend, qu’il est prêt à vous pardonner, qu’il vous redonne sa confiance et son amitié. Que votre vie soit l’histoire de cette amitié avec le Seigneur, ou plus exactement de l’histoire de l’amitié du Seigneur avec vous, puisque c’est toujours lui qui fait les premiers pas et prend l’initiative de nous offrir son amitié : « Je vous appelle amis…Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et institués pour que vous alliez, que vous donniez du fruit et que votre fruit demeure » (Jn 15, 15…16).

  1. La foi comme accueil de la vérité que Dieu nous révèle

Dans l’amitié comme dans l’amour, on est deux. Une amitié qui ne serait qu’une pure projection sur un autre de nos sentiments ou de nos désirs serait une amitié illusoire, une relation imaginaire. La véritable amitié, comme le véritable amour, se nourrit de la connaissance de l’autre, de ce que l’autre me révèle de lui-même, de ce qu’il me communique de sa propre vie. Il en va de même dans la foi, dans cette amitié avec le Christ.

La foi n’est ni un cri ni un pur sentiment. Elle a un contenu. Elle est écoute des paroles du Christ  et accueil de la vie qu’il nous communique. Comme il le dit lui-même, il est « La Voie,la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6).

Elle est écoute des paroles de Jésus et volonté de les mettre en pratique. C’est justement cette écoute qui nous affermit dans la foi, qui nous rend forts dans la foi. Car ces paroles du Christ sont comme le roc sur lequel nous pouvons construire la maison de notre vie. Rappelez-vous la parabole de Jésus : « Ainsi tout homme qui entend les paroles que je viens de dire et les met en pratique, peut être comparé à un homme avisé qui a bâti sa maison sur le roc…. » (Mt 7, 24-27).

Ce qui me frappe quand on regarde Jésus et qu’on écoute ses paroles, c’est qu’il ne centre jamais l’attention sur lui. Il n’est pas captateur. Il renvoie toujours à un autre, au Père qui l’envoie et à l’Esprit qu’il a reçu du Père et qu’il va lui-même envoyer.

Jésus n’est pas simplement un prophète, un sage, une personne qui a marqué l’histoire des hommes, il est le Fils bien aimé qui vit une communion d’amour avec le Père et révèle aux hommes son vrai visage (« Moi et le Père nous sommes un » Jn  10, 30). Le Fils vient révéler le visage du Père, ce vrai visage de Dieu qui est amour.

On peut dire que ce qui est au cœur de l’Evangile, c’est cette Bonne nouvelle pour tout homme où le Christ vient lui dire : « Tu es aimé. Qui que tu sois, tu es aimé, tu es le fils, la fille, bien-aimé(e) du Père. Laisse-toi aimer. Laisse cet amour t’habiter, te transformer. Il sera pour toi source de vie. Et si tu es aimé, tu invites à ton tour à aimer. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même. Fais cela et tu vivras ».

On peut dire que tout le message de l’Evangile, tout le contenu de la foi chrétienne tient en ces quelques mots. Le Credo que nous proclamons ne fait que déployer l’histoire de cette alliance, de cet amour, de cette amitié de Dieu pour l’homme, cette histoire du salut qu’il lui offre gratuitement.

Mais le Christ renvoie aussi à un autre qui est l’Esprit, cet Esprit qui naît de l’amour du Père et du Fils. Car cet amour du Père et du Fils ne se referme pas sur eux dans une espèce de cocon à deux. Il jaillit dans cet autre qui est le fruit de leur amour et qui est l’Esprit. L’Esprit, c’est l’amour qui se donne, qui se communique, qui crée gratuitement.

Et Jésus va communiquer aux siens cet Esprit. J’aime beaucoup ce texte de Jean où on voit Jésus faire un geste étonnant et pourtant tellement expressif : « Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint » » (Jn 20, 22). Jésus communique aux siens son souffle.

Jésus n’est pas qu’un enseignant, un maître de sagesse, dont on aurait à mettre ensuite tout seul en pratique son enseignement. Il est le Fils qui dans l’Esprit Saint nous communique sa vie, nous fait entrer dans sa dynamique d’amour, nous fait participer à sa vie de Fils : « (Vous avez reçu) un Esprit qui fait de vous des fils adoptifs et par lequel nous crions : Abba, Père. Cet Esprit lui-même atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu… » (Rm 8, 15-16).

Il y a donc dans la foi un message, une connaissance, un savoir mais il y aussi une expérience pratique. C’est d’ailleurs l’Esprit Saint qui, dans cette expérience, éclaire la foi, la nourrit, l’approfondit, la soutient, l’irrigue comme une source d’eau vive peut irriguer un champ ou désaltérer une soif.

C’est en ce sens qu’on peut dire que la foi est un don de Dieu, une grâce de Dieu. Elle est un don offert à tous comme une source est offerte. Mais, il ne suffit pas que la source coule, encore faut-il s’en approcher et prendre un peu d’eau dans ses mains pour s’en désaltérer.

La foi se nourrit par la réflexion. Il est important d’en acquérir une intelligence, de se laisser éclairer par la lecture de la Parole de Dieu, par la méditation de la Bible, de se nourrir de la foi de l’Eglise. On ne peut en rester au catéchisme de son enfance.

Comme dit saint Paul, autrefois vous avez été nourris au lait, maintenant il vous faut de la nourriture solide. Le Youcat qui vous a été distribué devrait être un bon outil de réflexion et de formation.

Mais la foi se nourrit aussi par la prière. Vous savez que dans l’amour ou dans l’amitié le dialogue est fondamental pour rendre vive la relation. Il en va de même pour la foi. C’est la prière, la participation à la vie sacramentelle de l’Eglise, à tous ces lieux où le Christ nous donne les signes de sa présence, qui sont la nourriture de la foi. Parfois, nous avons l’impression que notre foi est tiède, faible, fragile. En fait, elle est tout simplement anémiée, non suffisamment nourrie. Restons « branchés » sur l’Esprit Saint.

Une des actions du Tentateur, c’est de nous éloigner de Dieu, de nous inciter à nous retirer à petits pas, à espacer nos rendez-vous avec le Seigneur, à ne plus trop avoir de goût pour cela. C’est la tentation dont nous demandons à Dieu de nous délivrer dans la prière du « Notre Père » : « Fais que nous n’entrions pas dans la tentation ».

Et c’est là que nous réalisons que nous avons besoin les uns des autres pour nous soutenir et nous relancer dans la foi.

  1. La dimension personnelle et communautaire de la foi

Si l’appel de Jésus à chacun de ses disciples est profondément personnel, il n’est jamais purement individuel. Jésus appelle les Douze, non pas pour qu’ils restent ensuite chacun dans leur coin, mais pour qu’ils forment une communauté. 

Nous voyons la même chose pour les 72 disciples et pour les premières communautés chrétiennes. Le Christ ressuscité promet sa présence quand les disciples seront réunis en son nom : « Là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux » (Mt 18, 20).

Cette dimension communautaire de la vie des disciples du Christ n’est pas un hasard. Dans le don de son salut, Dieu ne vient pas faire « de la pêche à la ligne ». Il veut sauver l’humanité et inviter tous les hommes à vivre une communion avec lui et une communion entre eux. Le dessein de Dieu sur le monde est profondément communautaire Il appelle toute l’humanité à cette communion et lui indique que cette unité est possible.

L’Eglise doit donc être le signe et le sacrement de cette unité de tout le genre humain dans le Christ. La Constitution du Concile Vatican II Lumen Gentium le souligne particulièrement. L’Eglise doit être en quelque sorte l’ébauche ou la maquette de cette unité, de cette communion.

Ce n’est pas pour rien que l’image du repas, du repas de fête, est l’image de cette communion avec Dieu dans l’au-delà. Mais elle renvoie à cette pratique du repas, repas de Jésus avec ses disciples, dernier repas de Jésus avec les siens (au cours duquel il institue l’eucharistie) et repas du Seigneur pris par la communauté chrétienne  qui se réunit en son nom et témoigne ainsi de sa présence.


 

On comprend pourquoi à la Pentecôte l’Esprit est donné à chacun et à tous. C’est justement parce qu’ils sont réunis ensemble que les apôtres reçoivent l’Esprit. C’est en communauté qu’ils entrent dans une juste intelligence des Ecritures, dans un discernement de la volonté du Seigneur. C’est en participant à la foi et à la vie de la communauté des disciples du Christ que l’on devient soi-même croyant.

Celui qui se convertit au Christ et demande le baptême fait bien une démarche personnelle. Il dit « Je crois ». Mais il accueille comme sienne la foi de l’Eglise et proclame alors la confession de foi de l’Eglise, le « Je crois en Dieu ». Il dira  également la prière des disciples de Jésus : le « Notre Père » (Ce n’est pas « mon Père » à moi tout seul sans mes frères). La prière comme la foi de l’Eglise sont profondément communautaires.

C’est par l’Eglise, par les apôtres, plus près de nous par le témoignage de chrétiens que le Christ est venu jusqu’à nous, que la foi nous a été transmise. C’est en Eglise, dans la lecture de l’Ecriture, dans la célébration des sacrements, dans le partage fraternel que le Christ ressuscité vient à nous.

C’est en nous soutenant dans la foi, en la partageant, en la célébrant ensemble, en en témoignant que notre foi s’approfondit, s’affermit, comme dit Saint Paul. Très concrètement, posez-vous la question : comment vivez-vous votre appartenance à l’Eglise ? Quel est votre groupe porteur ? Votre communauté  fraternelle de partage, de célébration, de mission ?

Vivre les JMJ est une grâce, un vrai temps fort. Mais on ne peut pas vivre que de grands temps forts. On a besoin d’une communauté porteuse pour le quotidien. Ne demandons-nous pas à Dieu justement de nous donner « le pain de chaque jour » ? Et, c’est justement la grâce des JMJ de nous renvoyer à cette question, de nous interroger sur notre quotidien. Sachons prendre les moyens pour permettre au Seigneur de nous affermir chaque jour dans la foi.


 

+  Jean-Pierre cardinal RICARD

Archevêque de Bordeaux

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