“Oui, quelle lumière cette fête de Saint André !”

André garde la mémoire de son appel, de sa mission, de la communion avec son frère.

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Retrouvez l'homélie prononcée par Mgr James, archevêque de Bordeaux, le samedi 28 novembre 2020, lors de la célébration de la fête de saint André, patron de notre diocèse.

Samedi 28 Novembre 2020

Cathédrale de Bordeaux

C’est une fête inédite de Saint André. La nef de la cathédrale est vide ! A cause des mesures sanitaires, les cent confirmands adultes ne sont pas là. Et nous savons aussi les inquiétudes de beaucoup sur leurs emplois ou leur avenir. Quelle chance alors, cette fête de Saint André ! Je souligne trois mots lumineux : écoute, unité, mémoire.

Oui, c’est un temps de crise. C’est précisément en période de crise qu’André rencontre le Christ. Celui-ci vient d’apprendre l’arrestation de Jean-Baptiste. Le climat n’est pas facile. En Palestine, il y a de la violence, des tensions entre pouvoir politique et religieux, entre occupants romains et population. Que fait alors Jésus ? Il choisit de quitter Nazareth et de s’installer à Capharnaüm, au bord du lac. Jésus ne se replie pas, il cherche le contact. Au bord du lac, il y a du monde, des commerçants, des caravanes. C’est là que Jésus se tient. Il aime être là où sont les hommes. Il rejoint André sur son lieu de travail. Voilà notre Dieu : Il se fait proche de notre vie ; Il nous rejoint sur les lieux mêmes de nos préoccupations. Mais regardons André, notre saint patron. Quelle est son attitude ? Il entend l’appel du Christ. Il écoute. « La foi naît de ce que l’on entend » écrit Saint Paul. Oui, il entend l’appel du Seigneur sur son lieu de travail. C’est une des qualités majeures du disciple : Etre une grande oreille qui écoute ! André, un juif connaissait la prière du jeune roi Salomon au début de sa mission : « donne-moi un cœur qui écoute ! ». Ici en Gironde, nous sommes encouragés par Saint André, le premier appelé : en temps de crise, pour grandir dans la foi, nous nous mettons davantage à l’écoute du Seigneur. Nous prenons des temps de silence, nous méditons Sa Parole : quelle chance ce temps de l’Avent pour goûter les beaux textes qui sont proposés dans la liturgie. Ecouter le Seigneur dans sa Parole, l’entendre aussi à travers nos frères. C’est par eux que le Seigneur s’adresse à nous et nous indique des points d’attention, des priorités. Dans ces temps de crise, des gens déroutés, inquiets ont besoin de lieu de parole (je les encourage ces lieux de parole) où ils sont accueillis et écoutés, dans les écoles, les aumôneries d’étudiants, les paroisses. Dans nos familles aussi : entendre le Seigneur nous parler dans l’échange entre conjoints, entre parents et enfants. Ecouter l’autre, c’est lui permettre de prendre de la distance avec ses épreuves. Ecouter l’autre, cela suscite la naissance d’actions de solidarité, caritatives. Nous écouter les uns les autres, avec le souci d’entendre les appels du Seigneur pour ce temps de crise ; et la foi grandit !

Ecoute, unité. André est le frère de Simon-Pierre. C’est André qui conduit son frère à Jésus, rapporte Saint Jean. La fraternité, l’unité de deux frères évangélisent. Dans la Bible, il y en a des histoires de frères ! On ne masque pas la difficulté de la communion fraternelle. Rappelons-nous Jésus et son histoire du père et des deux fils, l’aîné et le cadet. L’histoire de notre Eglise est blessée aussi par des conflits, des divisions qui nuisent à l’Evangile du Christ. La crise que nous traversons met à mal, elle aussi l’unité dans nos familles, dans nos communautés chrétiennes. Les appréciations sur les mesures sanitaires, sur le sens à donner aux évènements, divergent. Il y a des heurts, des reproches les uns à l’égard des autres. Chrétiens, nous ne taisons pas nos différences. Comme dans la première communauté chrétienne, il peut y avoir des tensions entre Paul, Pierre ou Marc. Mais, comme dans la première communauté chrétienne, nous ne nous en satisfaisons pas ! Pourquoi ? Parce que nous serions des idéalistes, que nous aurions peur de la confrontation ? Non ! Mais car souvent nos divisions conduisent à oublier le cri des pauvres ! Pendant que nous débattons et nous disputons, les plus fragiles attendent notre aide ! Et aussi, et d’abord à cause du Christ Jésus et de sa prière : Père qu’ils soient Un ! Nous sommes faits pour la relation et la communion entre nous. « Pourquoi nous as-tu fait différents ? » se plaignait Ste Catherine de Sienne lassée des divisions. « Pour que vous ayez besoin les uns des autres », lui répond le Seigneur. A quelques jours de Noël, tous aspirent à se retrouver, mais des parents sont aussi inquiets : pourvu que pendant le repas, nos enfants ne se divisent pas ! Ou l’inverse : pourvu que mes parents accueillent bien mon conjoint ou mes enfants ! Saint André nous invite à désirer l’unité, la communion fraternelle. Dans l’Evangile, il n’y a pas de parole agressive entre André et Pierre. Et à cause du Christ, André le premier appelé s’efface devant Pierre. Qu’est-ce qu’une communauté chrétienne, une famille chrétienne ? Une communauté où on vit la confiance mutuelle, le dialogue, le pardon. Pour vivre réconciliés et unis « il est plus important de pardonner que d'avoir raison ! ».

Comment vivre cela ? Avec le Seigneur, et en nous rappelant le nom lumineux d’André. On me disait que dans la tradition hébraïque, il pourrait signifier : « celui qui a de la mémoire », non pas une mémoire habitée par le ressentiment, qui ressasse ce qui va mal. Mais dans notre tradition chrétienne, faire mémoire comme à chaque Eucharistie, c’est nous rappeler l’action du Seigneur, Ses passages dans nos vies. André garde la mémoire de son appel, de sa mission, de la communion avec son frère. Uni à Lui, ce matin, nous aussi nous gardons mémoire des communautés chrétiennes présentes en Gironde depuis des siècles, des ministres ordonnés, des consacrés, des éducateurs, des soignants qui l’ont servi. Il y en a eu des épreuves, des guerres, des divisions, des échecs. Mais aujourd’hui, en fêtant Saint André, nous sommes toujours là, désireux d’annoncer l’Evangile, car Dieu est fidèle, Dieu soutient son Eglise, Dieu aime ce monde. Oui, quelle lumière cette fête de St André ! Rendons grâce.

+ Jean-Paul James

Archevêque de Bordeaux

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