Le lundi 3 avril 2023, la cathédrale de Bordeaux accueillait nombreux ministres ordonnés et fidèles du diocèse pour célébrer la messe chrismale aux cotés de l’archevêque de Bordeaux Mgr Jean-Paul James. Découvrez son homélie.
Chers amis, la cathédrale qui nous accueille est en chantier ; des échafaudages sont dressés, on refait la toiture avant de nettoyer l’intérieur. Cette cathédrale est à l’image de notre Église. Ensemble, dans la diversité de nos vocations et de nos missions, nous participons au chantier de l’Église, chantier d’une Église fragilisée et abîmée, chantier de l’évangélisation et des paroisses nouvelles ici à Bordeaux : nous osons l’avenir avec le Christ, le Maître du chantier. Quel don nous fait-il ? Quel signe nous laisse-t-il ? Le signe des huiles saintes, huiles de force, de paix, de joie.
Dans cette semaine sainte, pour oser l’avenir, pour participer au chantier, regardons d’abord le Maître. Ne le quittons pas des yeux ! Nous ne pouvons pas remplir notre mission sans le regarder Lui. Qui est-il donc ? Il a reçu l’onction, il est le Messie de Dieu. La deuxième lecture ajoute : « à lui qui nous aime et nous a délivrés de nos péchés par son sang » Lui nous aime, nous les ouvriers aux bras cassés, les inconstants et les pécheurs, Lui ne répugne pas à nous aimer. Oh, nous ne pouvons pas minimiser notre péché. Jésus est mort pour cela. Mais des pécheurs que nous sommes, il vient faire « un royaume et des prêtres pour son Dieu et Père ». Il nous associe à son chantier. Alors, pour oser l’avenir avec le Christ, nous accueillons les dons qu’il nous fait, d’abord l’huile de force. « Que la puissance du Christ te fortifie ; qu’elle t’imprègne comme cette huile ». C’est ce qu’ont entendu les catéchumènes. Et le signe est répété avec le saint Chrême : « Sois marqué de l’Esprit-Saint ». Catéchumènes, baptisés, confirmés, dans cette messe chrismale, reprenons conscience de ce que Jésus nous dit par ces signes : « Quoi qu’il arrive, je suis ta force. » C’est l’expérience des personnes malades ou âgées célébrant le sacrement des malades : « Quoi qu’il arrive, je suis ta force ». Huile de force, huile de paix.
Ces huiles sont extraites du fruit de l’olivier. Nos aînés, les Pères de l’Église ont très vite associé ces huiles au jardin des oliviers, là où Jésus se rend pour pleurer des larmes de sang, mais là aussi où Jésus ressuscité rejoint son Père. Huile, rameau d’olivier, jardin des oliviers, autant de symboles de la paix que le Christ apporte au monde, par le sang de sa croix. Huiles de paix pour oser l’avenir avec le Christ dans ce monde violent, pour être des hommes et femmes de paix. Le pape François écrivait : « Nous tous, les chrétiens, petits mais forts dans l’amour de Dieu, nous sommes appelés à prendre soin de la fragilité du peuple et du monde dans lequel nous vivons » ( n°216 ). Oui notre monde est fragile : que de destructions et de violences ! Comment se fait-il qu’il y en ait tant en Ukraine et ailleurs ? Comment se fait-il qu’il y ait tant de tensions sociales ici et de manifestations violentes, expressions d’un « mal être » et parfois de haine ? « Soyons, pourtant bien convaincus que le moindre atome de haine que nous ajoutons à ce monde nous le rend plus inhospitalier qu’il n’est déjà » (E.Hillesum). C’est un des enjeux de nos paroisses : apporter dans nos quartiers le don de la paix, don du Christ ressuscité, en favorisant le dialogue, l’échange, la réconciliation, l’éducation, la solidarité, l’attention aux plus fragiles socialement, mais aussi à nos frères et sœurs en fin de vie en développant les soins palliatifs et la culture palliative. C’est l’enjeu aussi de nos fraternités chrétiennes de quartier, dans ce chantier de l’évangélisation. Car la seule réponse crédible à la violence, à l’indifférence religieuse, vient du témoignage de notre manière de vivre, la seule réponse crédible est celle de la charité en actes, visible, concrète et simple. À nous de l’écrire dans les projets missionnaires de nos paroisses.
Cette huile de paix est aussi, nous dit la première lecture, « huile de joie ». En effet, une source du bonheur, de vraie joie selon l’Évangile est du côté du service mutuel « On vous appellera servants de notre Dieu ». Servir Dieu, servir nos frères en humanité : nous ne nourrissons pas d’autre ambition, dans ce chantier de l’Église. Chers diacres, c’est d’abord pour cela que vous avez été ordonnés. Vous êtes signes du Christ pour rappeler à tous et pour notre joie, notre état de serviteurs. Merci de continuer cette belle mission avec l’aide de votre épouse, de vos enfants, de vos amis et le soutien de vos communautés.
Et vous frères prêtres, rappelez-vous cette onction de saint Chrême, huile de force, de paix et de joie reçue dans la paume de vos mains le jour de votre ordination. Signe que le Christ nous saisit tout entier, que nos mains deviennent ses mains, que nous ne sommes pas prêtres par ce que nous faisons, mais par ce que le Christ fait par nous. Et c’est notre joie ! Merci frères prêtres de la mission que vous avez accepté et que vous remplissez jusqu’au bout, je pense aux prêtres malades et âgés, je pense aux prêtres jubilaires. Merci tout particulier aux membres du conseil épiscopal, économe diocésain, chancelière, délégués épiscopaux laïcs, diacres ou prêtre, aux vicaires généraux et à mon frère évêque auxiliaire : vous rendez possible la mission de l’évêque.
Enfin, je veux m’adresser aux plus jeunes d’entre nous qui se posent la question de leur avenir. Rejoignez-nous pour oser l’avenir avec le Christ ! Nous avons besoin de vos talents, de votre jeunesse pour participer à ce beau chantier de l’Église, comme étudiants, jeunes professionnels, jeunes parents ! Notre diocèse a aussi besoin de pasteurs, de diacres, de consacrés pour se donner à ce chantier. Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement. Et ensemble, dans cette cathédrale et les autres églises, nous acclamerons le Maitre du Chantier : « à lui qui nous aime, à lui la gloire pour les siècles des siècles. Amen »
