Commencer dans la foi et la fraternité

 En ce début d'année, si nous nous disions tous : aujourd’hui, je commence, je commence dans la foi, je commence dans la fraternité.






Édito de Mgr Jean-Paul James, archevêque de Bordeaux, paru dans le journal diocésain de janvier 2020.

Dans quel état d’esprit êtes-vous au début de 2020 ? Comment abordez-vous l’année nouvelle ? Certains penseront : après les fêtes, la vie professionnelle et les études reprennent ; et avec elles, les déplacements, les réunions, les problèmes restés sans solution l’année dernière. Bref, ça recommence ! Un père de famille me disait : « je suis déjà fatigué à l’idée de recommencer ! » Alors, en ce début d’année, dans le diocèse de Bordeaux, avec l’arrivée d’un nouvel évêque, je vous propose non pas de recommencer, mais de commencer. Et si nous nous disions tous : aujourd’hui, je commence, je commence dans la foi, je commence dans la fraternité.


Commencer dans la foi

Aujourd’hui, je commence dans la foi chrétienne ! Les catéchumènes le disent souvent avec enthousiasme, à l’approche de leur baptême ; j’ai hâte de les rencontrer ! Mais, pour beaucoup d’entre nous, le baptême et la confirmation ont été célébrés il y a longtemps. Le risque serait d’en faire simplement des évènements du passé. Or, « si tu crois, si tu accueilles l’Esprit du Fils, disait Origène, Dieu t’engendre sans cesse ». Alors, en ce début 2020, nous naissons pour de bon de la Parole de Dieu et de l’Esprit-Saint. Et nous accueillons chaque jour de cette année nouvelle, comme un nouveau départ ; la Parole du Seigneur nous y encourage : « voici que je fais toutes choses nouvelles » (Ap 21,5). Sans doute, cela suppose une conversion du regard. Un regard sombre, en début d’année, paralyse. Mais un regard d’amour voit en chaque rencontre, du nouveau, en chaque personne, des tas de choses possibles. Celui qui aime, ne dit jamais : rien à tirer de celui-ci, rien à attendre de ces gens-là ! Car l’amour dit toujours : aujourd’hui je commence ! Je commence de croire, d’espérer et d’aimer ! C’est ainsi que nous allons commencer ensemble une nouvelle étape de la vie du diocèse de Bordeaux, prêtres, diacres, personnes consacrées et personnes laïques, évêques, jeunes et moins jeunes, personnes valides, personnes malades ou avec un handicap. Avec vous, je commence mon ministère dans un esprit de gratitude, de reconnaissance à l’égard de tous ceux et celles qui, depuis des années, participent à la mission de l’Église qui est à Bordeaux. Je vais prendre la route pour découvrir les différents secteurs du diocèse. Ce sera l’occasion de nommer ensemble joies et difficultés rencontrées dans nos missions, de reconnaître aussi le Seigneur qui est présent, qui agit, qui aime, qui relève, qui transforme nos personnes et nos communautés chrétiennes, par l’engagement de tant d’entre vous que je ne connais pas encore. Et l’ayant fait, nous vivrons la mission pour laquelle nous existons : proposer la foi chrétienne ! « L’Église existe pour évangéliser »[1] . À la suite des apôtres, elle répète : « Nous ne pouvons pas taire ce que nous avons vu et entendu »[2]. Nous sommes tous, selon notre état de vie, notre charisme, nos responsabilités, chargés d’annoncer l’Évangile, en commençant par le prêcher à la partie la plus rétive et incroyante de nous-mêmes. Oui, aujourd’hui, avec vous, je commence la mission toujours actuelle de l’Église !

Commencer dans la fraternité

Au cours de l’année 2020, beaucoup d’évènements se dérouleront qui aujourd’hui nous sont inconnus. D’autres évènements sont déjà annoncés, par exemple, les élections municipales dans nos communes ; d’autres évènements commencés en 2019, se prolongeront : crise sociale, violences ou misère, ici ou dans certaines parties du monde. C’est dans ce monde que la foi chrétienne a toute sa place. Andrea Riccardi fondateur de Sant’Egidio, écrivait il y a quelques temps : « Pour le christianisme, c’est le bon moment. Il faut recréer le tissu communautaire  ? C’est le rôle des chrétiens. Il faut parler d’espérance  ? C’est encore là que l’on attend les chrétiens. Il y a des risques de guerre  ? C’est le rôle des chrétiens que d’être artisans de paix ». Et il résume : « il nous faut être avec les gens. Les accompagner dans ce changement de monde ». Je retiens la proposition du Cardinal Ricard et de ses collaborateurs, de promouvoir les « fraternités chrétiennes » dans notre diocèse. Ces fraternités veulent être un lieu où se partagent, à la lumière de la foi, les joies, les soucis, et se créent des relations.
Souvent, nous nous interrogeons sur ce qu’est l’évangélisation, sur ce que peuvent être nos apostolats de prêtres, de diacres ou laïcs. Avec les fêtes de Noël, nous avons lu le commencement de l’Évangile de saint Luc. Qu’y a-t-il au début de la grande aventure chrétienne ? Deux rencontres, celle de Marie avec l’Ange, et de Marie avec sa cousine Élisabeth. En rencontrant sa cousine, Notre-Dame reçoit, à la fois un nouveau titre : « bénie entre toutes les femme » (Lc1, 42) ; et une confirmation de sa mission : elle sera « la mère de mon Seigneur » (Lc1,43). Et si l’évangélisation, en même temps qu’elle est une grâce, était aussi un art, l’art de la rencontre ? Aujourd’hui, je commence la rencontre, l’échange, la fraternité ! En rencontrant ceux qui nous entourent, nous pouvons nous aussi, à la suite de Notre-Dame, découvrir davantage l’amour dont nous sommes aimés, et notre mission. Plus notre foi chrétienne se donne, plus elle grandit. En encourageant les « fraternités chrétiennes », nous faisons grandir dans l’Église, la « spiritualité de communion » évoquée par le saint Pape Jean-Paul II, au début du nouveau millénaire, c’est à dire « la capacité d’être attentif, dans l’unité profonde du Corps mystique, à son frère dans la foi, le considérant comme « l’un des nôtres », pour savoir partager ses joies et ses souffrances, pour deviner ses désirs et répondre à ses besoins, pour lui offrir une amitié vraie et profonde »[3]. Si nos communautés chrétiennes, familles, paroisses, mouvements sont ces lieux du souci les uns des autres, du pardon vécu, de l’entraide, un témoignage considérable est rendu. Et des vocations naîtront, vocations de prêtres, de diacres, de consacré(e)s, de personnes laïques engagées au service du Christ et de son Église.


C’est le début d’une année nouvelle ! Avec vous, je suis heureux d’arriver dans le beau diocèse de Bordeaux ; c’est une joie de commencer ensemble, dans la foi et dans la fraternité chrétiennes !

Bonne année 2020 !

+ Jean-Paul James

1 Paul VI, Evangelii nuntiandi, 1975, n°14

2 Actes des Apôtres 4, 20

3 St Jean-Paul II, au début du nouveau millénaire, 2001, n° 43

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