Bénédiction prononcée par Mgr James pour l'inauguration du nouveau tabernacle et du nouvel autel de Saint-Bruno
Dans cette célébration, nous demandons au Seigneur, sa bénédiction pour le nouvel autel et le tabernacle restauré de l’église Saint-Bruno. Et cette célébration est l’occasion de nous rappeler la place de l’art sacré dans nos églises, et son lien avec notre foi catholique.
Oui, la place de l’art sacré. Nous avons la chance d’être réunis dans l’église Saint-Bruno, voulue par le Cardinal de Sourdis, alors archevêque de Bordeaux, tout occupé à mettre en œuvre le Concile de Trente. Face à nous, le tableau de Philippe de Champaigne, l’Assomption de la Vierge, et une Annonciation des Bernin, père et fils, une œuvre due à l’amitié qui les liait au Cardinal. En fidélité avec nos aînés, chers amis, vous avez fait appel à des artisans et artistes pour réaliser un tabernacle respectant le projet primitif, et un autel qui s’harmonise avec l’ensemble de l’édifice. Je veux exprimer ma gratitude à ceux qui ont permis le financement du tabernacle et de l’autel, mais aussi et d’abord, à ceux qui ont réalisé ces objets de culte, et redire l’estime de l’Église pour leur belle mission. « L’art, quand il est authentique, a une profonde affinité avec le monde de la foi (.. ), écrivait saint Jean-Paul II. Parce qu’il est recherche de la beauté, fruit d’une imagination qui va au-delà du quotidien, l’art est par nature, une sorte d’appel au Mystère ». Dans la liturgie de la dédicace d'une église, l'architecte, les représentants des corps de métiers remettent à l'évêque, les plans et présentent leur œuvre (ce que vous avez fait hier soir). Cet après-midi, ce travail de l'homme est béni : Dieu se réjouit de l’œuvre artistique de l'homme et le bénit. Aujourd'hui comme hier, l'Église a besoin de vous, chers amis artisans, artistes. Vous servez la Beauté, Dieu qui est Beauté. Et « ce monde dans lequel nous vivons a besoin de beauté, pour ne pas sombrer dans le désespoir… Rappelez-vous que vous êtes les gardiens de la beauté du monde ». (Vatican II). Entre les croyants, les artisans d’art, les artistes, il y a bien des connivences. Nous partageons la même quête, laquelle ? Exprimer le monde de l’ineffable, de l’invisible, rendre perceptible le monde de l’esprit. Car, comme le proclame le Christ Jésus dans l’Évangile, : « Dieu est Esprit, et ceux qui l’adorent, c’est en esprit et vérité qu’ils doivent l’adorer » (Jn 4, 24).
Voilà le culte inauguré par le Christ Jésus. Un culte en esprit et vérité. Il ne s’agit plus de nous tourner vers un lieu, le mont Garizim ou Jérusalem. Désormais, nous nous tournons vers le Christ Jésus, réellement présent dans les hosties consacrées et conservées dans le tabernacle. Et nous nous inclinons devant le tabernacle, comme nous nous inclinons devant l’autel. Combien d’artisans, d’artistes, d’ouvriers ont vécu comme un honneur, de pouvoir réaliser des objets pour le culte catholique. Ils le font, nous en avons la preuve devant nous, en y mettant tout leur savoir-faire, leur art, leur respect aussi, quand ils savent à quoi l’objet est destiné. Non, cet autel n’est pas un objet comme les autres. Il va être béni, préparé, avec des lumières et avec une nappe, pour recevoir le pain et le vin qui deviendront réellement le Corps et le Sang du Seigneur, à partir des paroles du Christ qu’avec les prêtres présents, je prononcerai ce soir à la messe. Du fait que c’est à l’autel que se célèbre le mémorial du Seigneur, le Saint Sacrifice, l’Église a toujours vu dans l’autel le symbole du Christ lui-même. Quand nous entrons dans l’église, c’est vers l’autel que nos yeux se dirigent. C’est Lui le Christ qui nous accueille, et qui, dans les sacrements de l’Église, se rend présent à nous, se donne à nous, veut faire en nous sa demeure et transfigurer nos vies.
Alors, en entrant dans l’église Saint-Bruno, en priant devant ces œuvres d’art, nous regardons pour nous-mêmes, le chemin à parcourir. Les uns les autres, nous sommes comme ces pierres extraites d’une carrière pour la construction de l’église Saint-Bruno, ou comme le bois d’ébène qu’on est allé chercher dans une lointaine forêt, pour réaliser le tabernacle. Et à travers le baptême, la catéchèse, les prédications, la charité, la communion fraternelle, comme ces pierres et ce bois, nous sommes dégrossis, équarris, poncés. Et ainsi se forme l’Église du Christ, faite de « pierres vivantes » qui servent à construire le Temple spirituel (1 P 2, 4-5). Et en priant devant des œuvres d’art sacré, nous sommes rappelés à notre dignité, notre grandeur d’enfants de Dieu, appelés à être transformés et transfigurés.
Alors, quelle grâce de vivre cette célébration dans une église riche d’œuvres de l’art sacré, quelle grâce de voir s’embellir encore cette église grâce au beau dialogue entre croyants et artistes, quelle grâce de pouvoir prier devant des œuvres qui nous rappellent notre vocation à tous : marcher vers Celui qui est l’Auteur de la Beauté. Amen