Jeudi 12 septembre nous étions reçus par Mgr de Éric Moulins-Beaufort, Mgr Norbert Turini, Mgr Denis Jachiet et le père Jean François Bour dans le cadre de la journée anniversaire des 50 ans du Service national pour les relations avec les musulmans (SNRM).
La journée s’est déroulée au siège de la Conférence des évêques de France (CEF) à Paris, en présence de M. Chems-Eddine Hafiz, recteur de la Grande Mosquée de Paris, du Cardinal Cristobal López Romero, archevêque de Rabat, Président de la Conférence des évêques de la Région Nord de l’Afrique (CERNA), du père Laurent Basanese s.j., représentant du cardinal Miguel Ayuso Guixot, official du Dicastère pour le Dialogue Interreligieux au Saint-Siège, et de M. Anouar Kbibech, Président du Rassemblement des Musulmans de France. Nous étions 150 personnes, chrétiens et musulmans, engagées dans le dialogue avec le GAIC, le GFIC, Mustapha CHERIF, Ghaleb BENCHEIKH , et de très nombreux délégués venus des quatre coins de France pour l’occasion.
En marquant cet anniversaire, la CEF a souhaité redire l’estime de l’Église de France pour nos concitoyens musulmans. L’équipe organisatrice a voulu réfléchir dans un cadre fraternel sur ce qui a déjà été vécu ensemble pour ouvrir de nouvelles perspectives de dialogue. Mais aussi pour manifester à la société que des croyants de religions différentes peuvent jouer un rôle constructif dans un contexte marqué par des inquiétudes et de nombreuses polarisations. De nombreux journalistes étaient présents.
Ce fut l’occasion de remettre en lumière la nature du dialogue islamo-chrétien. Je vous invite à écouter l’interview du père Jean-François Bour, directeur du SNRM, sur RCF et Radio Notre-Dame.
En quelques mots ci-dessous je me permets de rappeler les fondements du dialogue instauré en France et que nous mettons en œuvre dans le diocèse de Bordeaux depuis plus de 30 ans :
Le SNRM (appelé SRI à sa création) , et donc notre service diocésain, a pour mission de promouvoir la rencontre et le dialogue entre catholiques et musulmans, de former les catholiques à la connaissance de l’Islam et au dialogue interreligieux, d’encourager les relations entre catholiques et musulmans au service de toute la société. C’est ce que les 15 membres de l’équipe sur le diocèse de Bordeaux s’efforce de faire au quotidien.
Comme le rappelle le Père Jean François Bour, il s’agit d’un dialogue entre croyants sur les questions de société : « Nous sommes des croyants qui vont à la rencontre d’autres croyants, même si nous nous interrogeons parfois sur leur manière de croire« . Et nous le constatons ici en Gironde, ce qui nous donne l’occasion de nous de débattre souvent.
Nous nous engageons dans la société en tant que croyants de religions différentes pour construire une société fondée sur la justice et la paix. Ensemble, nous croyants nous abordons avec notre vécu et notre foi des sujets communs comme la fin de vie, l’écologie, la solidarité…etc. « Dans la spiritualité musulmane, la création occupe une place importante. Nous devons réfléchir à la manière dont nous pouvons, en tant que citoyens, œuvrer ensemble pour le bien commun. », comme nous le demande le pape François dans l’encyclique Laudato Si’. Nous avons fait à Bordeaux il y a deux ans une conférence débat commune sur ce sujet.
Nous avons aussi débattu de notre engagement pastoral, car les pratiques religieuses des musulmans, parfois visibles et assumées, interpellent les chrétiens. La France est le pays d’Europe qui compte le plus grand nombre de musulmans. « Les chrétiens peuvent être interpellés par le dynamisme de la foi musulmane« , analyse, comme nous tous, le père Jean-François Bour. « Il est important de s’interroger sur cette fierté d’être musulman, sur le courage d’afficher sa foi. Nous devons oser poser ces questions. » Et débattre ensemble du rôle de la foi dans une société laïque comme le dit la loi française. La Foi ne peut pas se cantonner à l’invisibilité de la maison. Elle joue un rôle dans nos postures et nos engagements. Nous rappelons à ce sujet que le 2 février 2025, nous marcherons tous ensemble pour la Paix dans les rues de Bordeaux.
Le directeur du SNRM rappelle enfin, et nous en attestons ici en Gironde, que la première mission d’un chrétien est de bâtir une relation vraie, sincère et authentique avec autrui, quelle que soit sa conviction. « Cela suppose d’oser exprimer ce que nous portons en nous. Dialogue et annonce vont toujours de pair. » Les mots de la déclaration Nostra Aetate du concile Vatican II, concernant les religions non chrétiennes, résument ainsi l’esprit du dialogue interreligieux : « L’Église catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. »
Et nous pouvons attester ici en Gironde, comme partout en France, que quand nous nous rencontrons pour débattre de théologie ou de société, jamais nous ne sortons sans avoir parcouru un bout de chemin vers Dieu.
Cette journée fut riche, sincère, ouverte, et nous sommes tous repartis avec l’envie de poursuivre à construire un monde vrai, fait de fraternité et de respect mutuel, de travail , d’écoute et d’engagements sociaux, de jeux et de sourires, parfois de peines. Mais nous restons tous vigilants aux dérives sectaires et aux replis identitaires de tous bords .
Daniel Ambry,
Délégué épiscopal
Service diocésain des Relations avec les musulmans